Quand, au cours de cette année, me suis-je accordée le temps de la rêverie? Quelques éclats de plaisirs, d'insolites et puissantes effluves de joie pure, mais je ne me rappelle nul moment de vacuité délicieuse. Ne suis-je donc plus une amoureuse ? Ou plutôt, la période de vie qui me traverse est-elle en vive résonance avec les soubresauts constants de cette période qui n'en finit pas d'être une mutation douloureuse pour l'humanité entière.
Quand retrouverai-je ces doux états où l'âme rassemblée et suspendue se laisse bercer au dessus de la trame accidentée du monde, moi qui, enfant, ai appris très tôt le rythme balancé de la 7ème rêverie de Rousseau : "quand le soir approchait, je descendais des cimes de l'île, sur la berge, dans quelque asile caché. Là le bruit des vagues et l'agitation de l'eau fixant mes sens et chassant de mon âme toute autre agitation la plongeait dans une rêverie délicieuse où la nuit me surprenait souvent sans que je m'en fusse aperçu..."
Quand retrouverai-je les prairies vertes et étoilées de pâquerettes et de boutons d'or du Morvan de mon enfance, les miroitements éblouis de la Seine vus de la rive du Pont Neuf, la volupté des voiles de Dar Ghizlane, les vols de cigognes, les vapeurs mouvantes cotonneuses ou effilochées des grands nuages, le calme plein du coeur? Quand retrouverai-je le temps des songes et de l'apesanteur?
Le chant crieur des piafs dans les platanes nus m'annoncent que je suis bien au coeur d'Aix, dont les toits, ce soir, sont nimbés d'un ciel uni, gris pâle et rose, léger, léger...
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