Rédigé à 11:51 dans Actualité / Evénements, Art, artistes amis & révélations | Lien permanent | Commentaires (0) | TrackBack (0)
Depuis fin 2006, date de ma venue en Provence, moi qui ai tant aimé les voyages, je suis sédentaire, d'une façon qui m'est encore étrange. La Sainte Victoire est mon horizon réel, et la Sainte Baume, un autre horizon, plus lointain, plus rarement exploré, mais toutefois p,lus familier dans mon imaginaire.
La Sainte Victoire est une site extra-ordinaire (je n'évoquerai pas la Sainte Victoire de Cézanne dont la présence sur la toile m'a bouleversée, il y a plusieurs années lors d'une exposition faite au Grand Palais, sans que je pense jamais vivre sous sa perpétuelle garde) : sa blancheur vibrante souvent m'apaise, ses changements constants de teintes, de loin sous les cieux azurés d'Aix, donnent corps à mes heures et mes jours et les inscrivent dans ma chair et mes sens; c'est une montagne sauvage, mâle, abrupte, rupestre, qui m'évoque le temps des dynosaures - elle indique pour moi l'échelle des temps -, un lieu d'énergie virile, assez tourmenté avec parfois des laves ruisselantes de terres ocres-rouges magnifiques, mais qui n'invitent ni à se lover ni à se confondre en elles.
Sainte Victoire vue de Chateau Neuf le Rouge
A contrario, l'image que je me fais de la Sainte Baume est toute féminine, secrète, mystérieuse, ronde, sauvage aussi mais douce, généreuse, permettant l'abri, le repos et les rêves mystiques.
Thierry Blondeau m'a demandé d'écrire sur le nom de la Sainte Baume dans son dernier petit guide de pays. J'ai eu grand plaisir à divaguer ainsi :
"Sainte-Baume", nom qui évoque communément la sainte "grotte" , issu de l'occitan "baoumo", qui désigne d'ailleurs plutôt un "abri sous roche", et qui serait lui même apparenté au nom commun féminin gaulois :"baou" (rocher), attesté souvent en toponymie : bien des lieux en France ont reçu ce beau nom de baume.
Et pourtant, cette seule étymologie me semble insuffisante pour désigner l'étendue des évocations reliées à cette Montagne Sacrée de la Provence, le coeur du coeur du coeur de la Provence, entend-on parfois. Sacrée sans doute depuis l' époque archaïque païenne lointaine, ensuite lors de la période antique, avec un culte attesté à Artémis, déesse vierge et chasseresse, mais aussi déesse de l'accouchement et des sages-femmes, avant le culte chrétien à la si belle figure de Marie-Madeleine : c'est une montagne dédiée aux femmes, à leurs savoirs, à leurs mystères.
J'ai donc plaisir à croiser les étymologies quand il s'agit de la Sainte Baume odoriférante de tant d'essences et de résines, et à penser au " baume" plus qu'à la grotte, celui qui vient du nom grec "balsamon", et qui convient si bien à Marie-Madeleine : pour elle qui panse les plaies du Christ avec ses parfums, quelle autre montagne pouvait l'acceuillir, chargée des parfums qui s'exhalent des plantes ? N'y a t'elle pas trouvé le repos dans cette Montagne si prête à offrir du baume à l'âme et au coeur, elle la consolatrice, l'adoucissante, la calmante. Comment ne pas évoquer aussi à ce nom l'onguent et la sainte huile qui guérit les blessures de l'âme et du corps ?
+ voir le guide 213 du pays de la Sainte Baume : Téléchargement Guide-pays-2013
Pour le printemps, voici la nouvelle identité visuelle de Visions+ :
+ un nouveau site vitrine :http://www.visionsplus.fr/
et toujours, nos produits passions :
du Sens & des Visions Partagées
1. la R.S.E (Responsabilité Sociale d'Entreprise, bientôt R.S.O ), comme nouveau modèle de l'entreprise
2. Identités & Cultures (études & recherches, diagnostics opérationnels)
3. l' Ecologie Sociétale
participation à et co-construction de tout projet de plateforme collaborative ou d'élaboration d'intelligence collective (mouvement, organisation, équipe, groupe, association...)
Vive ce printemps florissant !
PAPer'Art Project poursuit son bon élan. Je vois avec plaisir les touristes et les badauds aller et venir nombreux dans la Cour de l'Hôtel de Chateaurenard autour du "Crâne" réalisé par Méta2, et des "Feuilletés" de Max Sauze.
Les Galeries exposent quelques artistes très talentueux du 9 ème Art, et l'Atelier Conti a fait une très belle exposition sur le mail art ou art postal. voir le blog dans www.gudgi.org
Et à partir du 6 mai, ce sont les techinques de l'Art du Papier qui sont valorisées, en partie à l'Hôtel Estienne de Saint Jean ou Musée du Vieil Aix et dans plusieurs galeries ou autres lieux de la ville :
Rédigé à 16:49 dans Actualité / Evénements, Art, artistes amis & révélations | Lien permanent | Commentaires (0) | TrackBack (0)
1958, jours de terreur sur l' île du Désir. Panos l'instituteur, amoureux des fleurs, amène Laurence Durell à l'endroit qu'il sait, sur la montagne, au dessus de la mer où est née la belle Aphrodite, et voici qu'une onde virginale de blancs cyclamens éblouit leurs yeux : " c'est alors que nous vîmes les cyclamens que cherchait Panos- des nappes entières de cyclamens qui scintillaient comme de la neige fraîche, chaque fleur palpitant sous la brise, si bien qu'au premier coup d'oeil on avait l'impression d'un champ peuplé de millions de papillons". Ils boivent un vin frais et oublient alors la terreur des événements du monde.
J'aimerais sentir ce que sentent les fleurs des troënes sous le vent du printemps. J'aimerais que mon corps exhale le parfum si intime et chaud et frais et voluptueux du géranium rosat qui m'énivre dans la lumière du jour, qu'il s'évapore comme les fleurs du tilleul reposant l'été et de la verveine fraîche au début d'automne, j'aimerais qu'au soir de ma vie mon corps vieilli irradie de subtils parfums et d'essences inconnues. Ah ! Puissè-je être fleur et m'évanouir simplement comme je suis venue au jour !
"la rose s'ouvre à moi par son parfum"
PAPer'Art Project se poursuit à Aix-en provence avec le parcours PAPiers Poèmes et la très belle exposition phare à L'Hôtel de Gallifet, depuis le 6 mars :
Aller aussi dans les autres lieux du parcours : Atelier Conti, Théâtre du Ruban Vert, Galerie Vincent Bercker, The RedDoor Gallery... voir le site : www.gudgi.org
Rédigé à 12:50 dans Actualité / Evénements, Art, artistes amis & révélations | Lien permanent | Commentaires (0) | TrackBack (0)
Le 7 mars dernier , le journal gratuit "20 minutes" a intégré quelques unes de mes réflexions qui m'avaient été demandées en quelques minutes par téléphone la veille.
Je reproduis ici tel quel l'article paru, qui m'incite à tenter de trouver le temps nécessaire pour déployer à quel point le corps est plastique, à quel point il est le résultat d'une construction issue de l'imaginaire social plus encore qu'individuel, et combien le corps participe de l'identité, résultante jamais définitive, d'une construction elle même symbolique et imaginaire.
Voici l'article :
Jeune, beau et mince. Le corps de la femme est soumis aux diktats. Pas facile d’apprivoiser son image: 50% des femmes se regardent nue devant la glace moins d’une fois par semaine et 15% d’entre elles considèrent leur corps comme un handicap. Alors, est-il facile de contempler son reflet?
«Fuir le miroir, c’est douloureux»
Le narcissisme est une base nécessaire. « Ce qui est important, c’est de supporter le reflet dans le miroir. Fuir le miroir, c’est douloureux », estime le docteur Isabelle Sarfati, chirurgien plasticien à l’Institut du sein. « Les femmes qui se regardent dans le miroir vérifient si leur image correspond bien à ce qui est socialement accepté », poursuit Odile Solomon, sémioticienne. « Les miroirs en pieds sont apparus à la fin du XIXe siècle, c’est donc une pratique assez récente », rappelle Catherine Örmen, conservateur du patrimoine et auteur de Un siècle de mode (Ed. Larousse).
«Le corps est le résultat de notre imaginaire social»
«Le corps de la femme doit être en adéquation avec des normes valorisées», estime Odile Solomon. Des normes qui varient selon les époques. «Dans les années 1970, le sex symbol en France, c’était Jane Birkin. Les filles à petites poitrines étaient valorisées par cette image. Maintenant, la mode est aux poitrines plus rondes», explique le docteur Isabelle Sarfati. «Le corps est le résultat de notre imaginaire social», confirme Odile Solomon. «Le corps est notre interface avec le monde et nous sommes souvent plus intransigeants avec nous-mêmes qu’avec l’autre», note Isabelle Sarfati. Mais au fil des ans, «les femmes s’affranchissent du regard de l’homme», se réjouit Catherine Ormen.
Particularité du corps, il peut être caché. «Ce qui est difficile pour certaines, c’est de se déshabiller», constate Isabelle Sarfati. «Dans les années 1950, le vêtement façonnait le corps. Dans les années 1980, avec le lycra, le corps dessinait le vêtement, l’insatisfaction était grande», résume Catherine Örmen. Aujourd’hui, avec les artifices de la lingerie (push-up, matières gainantes), les femmes sont plus satisfaites de leur corps. Et c’est tant mieux.
Rédigé à 12:19 dans Femmes, Femmes, Femmes | Lien permanent | Commentaires (0) | TrackBack (0)
Voici un excellent article qui résume fort bien un ouvrage de Pascal Chabot, édité au PUF: "global burn out" , qui tente de discerner les causes du dégout et de l'affaissement des individus, hommes et femmes, généralement les plus engagés au sein de nos sociétés, quand la pression et l'exigence de "performance" deviennent trop fortes.
Il vient en contraste avec cette belle photo des enfants d'un village d'Afrique du Sud de culture Xhosa, où tous s'élancent ensemble, en se tenant la main, pour "gagner" des fruits d'une corbeille qui était promise au seul vainqueur, et qui se partagent en cercle égal leur récompense : Umbutu, disent-ils : "je suis parce ce que nous sommes".
Voici l'article de Stéphanie Favreau, extrait de Nonfiction.fr, le portail des livres et des idées :
Le choléra des temps modernes
Il faut d’abord noter le style fluide et précis de ce texte qui permet de distinguer, au cœur de ce phénomène complexe et multifactoriel qu’est le burn-out, les différents éléments qui le composent. Le lecteur sera également surpris par les premières pages du livre qui lui donneront l’impression de lire un roman. Le détail de la description de cette femme qui tout à coup éclate en sanglots au volant de sa voiture, arrêtée sur la bande d’arrêt d’urgence d’une autoroute, n’est en effet pas sans rappeler quelques scènes du Hussard sur le toit où Giono dépeint ces corps vidés, déformés par le choléra, suintant leur mal de tous côtés. Analogie dans le style donc mais peut-être aussi sur le fond tant il est tentant de faire du burn-out le choléra des temps modernes.
L’acédie contemporaine
Pour mieux définir le burn-out, l’auteur propose d’abord un rapide retour sur l’historique de la notion. On apprend ainsi que si le psychiatre et psychanalyste contemporain Freudenberger fut le premier à faire entrer ce terme dans le langage médical, on trouve des traces bien plus anciennes de ce phénomène dans un tout autre domaine. Ainsi le rapprochement avec l’acédie qui toucha les plus dévoués des moines et autres théologiens est particulièrement bien choisi dans la mesure où il illustre le caractère paradoxale du burn-out, à savoir le fait que ce soit les plus fervents défenseurs d’une cause qui finissent par s’épuiser de leur propre engagement. L’acédie pour le religieux "ce sont les Notre Père qui ne passent plus, les Ave Maria qu’on oublie, les génuflexions dont on ne se relève pas" . De la même manière, dans l’observation de Freudenberger, c’est le médecin ou l’infirmier qui tout en ayant longtemps cru en la valeur de son engagement ne peut plus, un beau matin, se lever pour aller travailler.
Si le burn-out fait aujourd’hui tant parler de lui, c’est qu’il ne touche plus seulement ces professionnels du soin au chevet de ceux qu’une idéologie que l’on examinera tout à l’heure qualifierait de "maillons faibles", mais bien les piliers du système libéral, "les fiers-à-bras du mérite, les héros de l’effort récompensé" . Si le burn-out inquiète, c’est qu’il recèle toujours "une remise en cause des valeurs dominantes : il génère les nouveaux athées du techno-capitalisme" .
Les mécanismes de l’absurde
Pour tenter d’expliquer ce paradoxe, Pascal Chabot distingue trois caractéristiques de notre époque postmoderne qui bien entendu dans les faits s’entremêlent.
Le burn-out est un essoufflement du perfectionnisme. Le développement économique mondial s’est largement basé sur l’idéologie du self made man. Dans cet archétype du libéralisme l’individu est encouragé à se dépasser lui-même et à courir après ce mirage qui veut que par le travail il atteigne au plein accomplissement de lui-même. Ainsi la réussite professionnelle a remplacé le salut. Ce qui fera le piquant d’une telle vie, c’est qu’étant donné que les meilleures places sont rares, il faudra jouer des coudes pour s’imposer. Embarqué malgré lui dans cette compétition, chacun va alors se lancer dans l’aventure et sacrifier sur l’autel du travail tout un pan de sa propre personne. Aussi il ne suffira pas une fois la carrière entamée, de maintenir un rythme de croisière, il faudra en faire toujours plus car la concurrence veille et le profit n’attend pas. Le
perfectionnisme au service d’un tel gouffre se transforme alors en un véritable cauchemar régulateur.
Le burn-out est également un essoufflement de l’humanisme. En effet, pour maintenir la cadence, des moyens plus directs escortent la course à la reconnaissance. Chaque entreprise digne de ce nom dispose ainsi de deux composantes majeures : un service de ressources humaines et une équipe de managers. Bien sûr le service de ressources humaines est un élément indispensable pour la survie même de l’entreprise, mais ce que l’auteur lui reproche c’est d’avoir glissé d’un sens plutôt figuré à un sens propre qui transforme la formule en un véritable oxymore. Pour les postmodernes en effet, "l’humain est une ressource : qu’il dégorge, lui aussi, ses meilleures énergies, sa sueur, son temps. Il est, de toutes façons, surnuméraire et donc remplaçable" . Les ressources humaines sont donc chargées de repérer les meilleurs étalons à aligner dans la course au profit, de remercier aussi les boiteux et autres lessivés tandis que l’équipe des managers s’occupent de ceux qui sont encore en piste. Pour nous donner une idée du genre d’âme parfaitement morte que peux générer un tel système, l’auteur laisse la parole au manager lui-même : "J’ai rempli mes missions. J’ai managé par la terreur, j’ai choisi des maillons faibles. Il y a eu des cas de suicides en effet, qu’y puis-je ?" .
Parce qu’il y a forcément un moteur caché à cette machine infernale, le burn-out peut également se définir comme une course à la reconnaissance. En effet, "l’humain, qui, contraint par la nécessité, fait en l’occurrence violence à son égoïsme, veut voir ce sacrifice souligné" . Il est bien prêt à se sacrifier, mais il faut en retour lui assurer un minimum de reconnaissance. Le comble du cynisme, c’est que c’est précisément parce qu’il aura le sentiment, trop humain qu’il est, qu’on lui est reconnaissant, qu’il persévèrera dans ses efforts. Pascal Chabot cite d’ailleurs sur ce point les analyses d’Axel Honneth qui a très bien "vu que la reconnaissance pouvait être une arme idéologique grâce à laquelle, sous couvert de flatterie, on cantonnait les individus dans une fonction subalterne pour les empêcher d’en sortir" .
Ce que le burn-out nous révèle à travers des trois caractéristiques, c’est qu’au fond pas même les plus dévoués à leur tâche ne sont dupes du non-sens au service duquel leurs forces sont mises à contribution. Le burn-out signifie que les flatteries et les sourires ne suffisent plus à masquer le vertige de la logique du profit. Seulement pressenti, non explicitement dit ni pensé, l’absurde sera vécu, somatisé. "Les corps sont intelligents. Ils en savent parfois davantage sur nos besoins que nos psychismes bridés" . Le burn-out nous apprend qu’on ne peut pas faire l’impasse sur cette nécessité pour chacun d’avoir du temps pour soi. Les fétiches en tout genre n’y feront rien, il faut vivre.
Si ce phénomène en est venu à miner les corps, c’est peut-être aussi parce qu’il n’y avait plus aucun espace pour que l’absurde s’exprime. La culture s’étant en effet elle-même mise au pas de la course du profit. En ce sens on ne peut que constater "les fausses promesses de l’économie de la connaissance" . La logique capitaliste, que l’on peut donc qualifier d’absurde dans la mesure où rien ne semble pouvoir assigner de limites au profit, cette logique qui faisait vivre l’entreprise s’est immiscée comme une pieuvre jusque dans la vie privée des individus de façon à ce que les loisirs eux-mêmes et toute forme de recherche de sens deviennent profitables. On vous vendra jusqu’aux recettes du bonheur.
Ce que le burn-out révèle, c’est une forme d’existentialisme déraciné où "il y a une immense tourbe d’hommes qui sentent par sentiments tout faits, […] qui pensent par idées toutes faites, […] qui veulent par volontés toutes faites" .
Les racines idéologiques
Pour mieux voiler cette trainée de poudre en train de se répandre sur la postmodernité, certains diront que le burn-out ne concerne que les "faibles" et autres "inadaptés". Ils se réfugieront donc derrière cette autre arme idéologique qu’est l’argument pseudo darwinien d’une lutte pour la survie qui implique nécessairement des dommages collatéraux. "Ce n’est cependant pas le bon axiome. L’humain, en vérité, est l’être plastique par excellence." . Il s’adapte à des situations nouvelles et les musées d’ethnologie regorgent des vestiges de cette diversité humaine. Dans chaque civilisation on trouvera d’ailleurs une forme de spiritualité et de culture qui répondent à d’autres exigences que celle de la simple adaptation au milieu. C’est qu’en effet s’adapter, dominer son milieu est une chose, "il faut en plus se réaliser" . L’humain est cet être qui a besoin de trouver un sens à ce qu’il fait, à sa vie, il a besoin de se projeter dans un horizon qui dépasse les préoccupations quotidiennes tout en leur donnant leur aplomb. Or, quand la logique de l’absurde a finit par recouvrir tout attente, le système entre en crise.
Ainsi "l’humanité gémit, à demi écrasée sous le poids des progrès qu’elle a faits" . Les progrès de la technique qui devaient la libérer sont désormais au service d’une logique de production coupée de tout rapport sensé au réel. Le travail grâce auquel l’homme devait se libérer de l’emprise de la nature pour se consacrer à "des finalités plus intéressantes, plus métaphysiques et plus tendres" est devenu le piège que personne ne peut éviter et que rien ne semble pouvoir déjouer.
Enfin concernant ce culte de la performance qui plante ses racines dans le modèle patriarcal, une autre remarque de l’auteur mérite d’être pointée. La question du burn-out prend en effet une dimension particulière quand elle concerne les femmes. De nombreux cas se déclarent chez des professionnels du soin et de l’enseignement, or ces postes sont principalement occupés par des femmes. Mécaniquement le burn-out touche donc plus souvent celles-ci que les fiers-à-bras en col blanc. Un double piège se tend ici. On dira tout d’abord que les femmes se tournent vers ces métiers parce qu’elles sont naturellement plus douces, plus compatissantes, plus dévouées. En réalité c’est l’histoire qui a façonné ce mythe et "ce naturalisme est commandé par un intérêt social plus ou moins bien compris" . Mais le côté tragique de l’histoire, c’est que quelque part la femme s’y est laissée enfermer, qu’elle adhère à ce discours et interprète son comportement à la lumière de cette grille de lecture.
La mise en exergue de cette question du "Women’s burn-out" par l’auteur est intéressante dans la mesure où elle peut, dans une certaine mesure, éclairer également la situation globale. En effet, de la même manière qu’aucune n’est responsable de la situation de toutes les autres mais participe pourtant à quelque degré de la survie des valeurs patriarcales, aucun postmoderne n’est responsable de la situation de tous les autres bien qu’il l’entérine en permanence. Il est bien sûr tentant de désigner des coupables mais en réalité chacun est "à moitié victime, à moitié coupable, comme tout le monde" .
Les psychologues diront que le burn-out est une réaction endogène, les sociologues que c’est un phénomène exogène. Mais "c’est en cela que l’approche philosophique, qui est relationnelle, enrichit le débat. Pour elle, dans les troubles miroirs et les maladies de civilisation, c’est la relation entre l’individu et le social qui pose problème. Or, il faut être deux pour construire une relation" . Bien sûr les deux types de facteurs peuvent s’entremêler mais le burn-out ne tombe pas sur l’individu de dessus, il ne surgit pas non plus de dessous, il apparaît sur ce rebord de l’existence où l’individu en relation avec son environnement cherche à réaliser autant qu’à prendre. Si le burn-out caractérise bien une logique de l’absurde c’est qu’il correspond dans une certaine mesure à la célèbre définition de Camus : "L’absurde naît de la confrontation de l’appel humain avec le silence déraisonnable du monde" .
Vers un pacte technologique
Afin de commencer à enrayer "la machine burn-out", l’auteur propose deux choses.
Tout d’abord il faudrait sérieusement "réfléchir à une pénalisation des techniques de gestion du personnel qui utilisent la peur et le harcèlement moral comme stratégie" .
Ensuite il faudrait envisager d’élaborer un pacte ou "contrat technologique" qui, en tant qu’idéal régulateur remettrait à leur place des logiques qui n’ont d’autres fins qu’elles-mêmes.
Ce que l’analyse du burn-out permet de dégager, ce sont deux voies d’évolution possible. D’un côté il y a le chemin qu’emprunteraient volontiers les post humanistes. Pour remédier aux imperfections de l’homme actuel, ils inventeraient les technologies capables d’en faire une machine qui ne chercherait pas "le bureau des réclamations métaphysiques" . De l’autre il y a l’humain et ses défauts, ou plutôt une vision de l’humain dans laquelle le besoin de temps et la recherche de sens sont des incontournables pour lesquels "il n’y a pas de solution car il n’y a pas de problème, mais seulement la vie qui passe à travers les générations et qui est la matière de tous les humanismes"
Rédigé à 11:55 dans Actualité / Evénements, Visions+, RSE & mutations sociétales | Lien permanent | Commentaires (0) | TrackBack (0)
Voilà ce que peuvent porter de meilleur les surprises d'internet pour se ré-accorder à sa vie intérieure ou antérieure, c'est selon : Mon frère, grand mélomane, me demande d'écouter avec attention et de regarder sur youtube cet extrait d'une master class " Schuman" donnée à Paris par Alfred Cortot, en 1953 :
2 minutes de grande intensité, où le génie pur d'un immense interprète s'incarne dans le visage aux yeux si expressifs et dans la parole si nette d'Alfred Cortot,
et 1 seconde pour que fasse irruption soudain le passé...et une belle part de mon héritage spirituel : le jeune homme qui attend son tour et tourne une feuille de partition est mon oncle, Jean-Claude Morel, jeune talentueux pianiste concertiste disparu trop tôt !
J'avais 4 ans alors, mais mon enfance et le début de mon adolescence ont été en partie irriguées par l'âme artiste de cet homme; c'est lui à qui je dois entre autres la découverte très précoce de la peinture de Vélasquez ou du cycle de la "Belle Meunière" de Schubert...C'est à lui que je dois, je le vois ici, la transmission de l'esprit de ses maîtres :
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Voilà ce que peuvent porter de meilleur les surprises d'internet pour se ré-accorder à sa vie intérieure ou antérieure, c'est selon : Mon frère, grand mélomane, me demande d'écouter avec attention et de regarder sur youtube cet extrait d'une master class " Schuman" donnée à Paris par Alfred Cortot, en 1953 :
2 minutes de grande intensité, où le génie pur d'un immense interprète s'incarne dans le visage aux yeux si expressifs et dans la parole si nette d'Alfred Cortot,
et 1 seconde pour que fasse irruption soudain le passé...et une belle part de mon héritage spirituel : le jeune homme qui attend son tour et tourne une feuille de partition est mon oncle, Jean-Claude Morel, jeune talentueux pianiste concertiste disparu trop tôt !
J'avais 4 ans alors, mais mon enfance et le début de mon adolescence ont été en partie irriguées par l'âme artiste de cet homme; c'est lui à qui je dois entre autres la découverte très précoce de la peinture de Vélasquez ou du cycle de la "Belle Meunière" de Schubert...C'est à lui que je dois, je le vois ici, la transmission de l'esprit de ses maîtres :
Rédigé à 09:41 dans Partenaires, amis, amours...les bonnes rencontres de la vie | Lien permanent | Commentaires (0)